Pour une fois, Firmament Cendré s'accordait un moment de paresse. Il sentait, par la caresse des rayons sur son échine, que le soleil s'était déjà levé et commençait à nimber la Tanière des Guerriers de sa douce chaleur de la saison des Feuilles Mortes. Beaucoup s'étaient déjà levés pour partir en chasse ou en patrouille, et il avait senti sur lui plus d'un regard étonné.
C'est qu'il n'avait pas coutume de paresser. Il se levait souvent avant l'aube pour profiter de la pénombre du petit matin et apprécier le lever du soleil. Mais cette nuit-là, il avait chassé jusqu'à ce que les dernières étoiles disparaissent devant l'approche de l'aurore. Il se permettait donc un petit somme réparateur.
Firmament appréciait dormir dans la Tanière des Guerriers, même depuis qu'il était le Lieutenant, car il y retrouvait la chaleur de sa mère. Pelage Nuageux, qui l'avait accompagné dans sa chasse nocturne, était en effet lovée contre lui. Il était maintenant plus grand qu'elle, plus long et plus lourd aussi, mais il se sentait toujours comme un Louveteau quand ils dormaient comme ça.
Un peu plus loin, Fourrure Hivernale gigota dans son réveil et s'étira bientôt en baillant à s'en décrocher la mâchoire. Le soleil lui était tombé dans les yeux et, dès lors, la Louve blanche était totalement réveillée. Elle était de ceux qui avaient besoin de l'ombre pour dormir. Firmament Cendré lui adressa un museau souriant qu'elle lui rendit, sous les yeux bougons de Pelage Nuageux.
Elle n'aimait jamais quand les moments de tendresse avec son fils se terminaient. Mais elle était aussi une Louve pragmatique. Ce fut elle qui se leva en premier pour rejoindre son amie en quête d'un repas matinal, non sans léchouiller avec entrain le crâne de son fils qui en ressortit tout ébouriffé, et agité d'un jappement de rire.
Ce fut à son tour de se relever en baillant, tout en avisant qu'il était le dernier dans la Tanière. La journée s'annonçait belle, ni trop chaude, ni humide, et encore épargnée par la morsure de l'hiver. Firmament Cendré sortit de la grotte l'esprit ailleurs, déjà en train de se demander ce qu'il allait faire de ce nouveau jour, quelle proie allait-il chasser, ou s'il allait se reposer pour profiter de la nuit.
Ses pas le menèrent vers la Pouponnière. Quand il s'en rendit compte, un sourire en coin étira ses babines et ses yeux pétillèrent de joie. Quel tour allait-il pouvoir jouer aux petits Louveteaux sans défense de la Meute du Temps ? Il aimait tellement les taquiner...
Une scène incongrue l'accueillit cependant quand il arriva près de la Pouponnière. Un petit Louveteau noir s'agaçait à grands râles contre un pauvre caillou, sous le regard dépité d'un autre Louveteau, celle-ci étant d'un pelage aussi blanc que de la neige. Un sourire attendri lui échappa et il se rapprocha du petit noir.
- Je crois bien que ce caillou voudrait t'obéir, Petit Blaireau, mais il n'a pas de pattes pour se déplacer, lui dit-il sur le ton de la confidence en camouflant son amusement. Il lui faut un peu d'aide...
Il accompagna sa parole d'un geste doux pour décaler le caillou un peu plus loin et libérer le passage du Louveteau. Il préférait lui apprendre par là la douceur de la diplomatie, plutôt que la violence du combat en l'éjectant de son chemin.
Son œil amusé se décala sur Patte Blanche.
- Alors qu'avez-vous prévu aujourd'hui, les petits ?